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Mme Jihane Annane (MR), corapporteuse. - Hasard de l'histoire ou du calendrier parlementaire, nous nous prononçons aujourd'hui sur l'évolution de l'Alliance atlantique, dix-sept ans jour pour jour après la chute du Mur de Berlin. Cet événement historique du 9 novembre 1989 a permis de réunir les deux parties et les populations d'un même continent mais a aussi bouleversé radicalement la carte institutionnelle de l'Europe, le sort, le rôle et l'étendue géographique des institutions économiques, militaires et politiques mises en place à la suite de la seconde guerre mondiale et qui ont structuré la vie de notre continent pendant quarante ans.
Ceux qui gardent la mémoire de l'Histoire se souviennent de la construction du système de sécurité en Europe : signature du Traité franco-britannique de Dunkerque en 1947, puis du Traité de Bruxelles en mars 1948, élargissant cette alliance aux pays du Benelux et créant la future Union de l'Europe occidentale, autant de jalons qui conduisirent à la signature, le 4 avril 1949 à Washington, du Traité de l'Atlantique Nord.
Comme l'a rappelé le professeur Bozo lors des auditions organisées en commission des Relations extérieures et de la Défense, le fondement de l'Alliance atlantique reste sa première raison d'être : la défense collective des membres de l'Alliance telle qu'exprimée par l'article 5 du Traité de Washington, une défense collective contre une menace extérieure. Le rôle essentiel de l'Alliance était en 1949 et reste en 2006 la défense collective de ses vingt-six membres actuels, et cela même si on est passé graduellement, à la suite de la fin de la guerre froide, d'une notion de défense collective à celle de sécurité collective.
L'Alliance atlantique est, comme son nom l'indique, un contrat de sécurité entre deux partenaires, entre deux continents, afin de sécuriser un espace commun. Cette relation États-Unis/Europe a depuis le départ été asymétrique en termes de puissance militaire, de cohérence et d'ambition politique. Si l'Europe est parvenue à s'unifier depuis 1957, à s'étendre à l'échelle d'un continent, à tisser des liens avec tous les grands acteurs internationaux, si l'Europe est devenue un acteur majeur de la scène internationale, l'Europe telle que nous la connaissons actuellement n'est pas encore un acteur mondial en termes de puissance et d'influence politique. L'Europe joue son rôle, un rôle considérable d'ailleurs, en matière économique et commerciale et en matière d'aide au développement mais ne constitue toujours pas un acteur déterminant sur le plan de la sécurité internationale à l'échelle du globe.
N'oublions pas que l'OTAN a été créée en 1949 parce que l'Europe n'était pas capable de se défendre elle-même. L'Alliance était et reste donc une garantie de sécurité américaine pour l'Europe. Cette garantie reste nécessaire. Pourrions-nous gérer aujourd'hui seuls, grâce à nos instruments actuels, la crise yougoslave des années 1991-1995 avec plus de succès ? Pourrions-nous faire face à un nouveau Kosovo sur notre continent ? Cependant, il est clair que cette garantie de sécurité entraîne une certaine dépendance politique vis-à-vis de Washington.
Nous trouverons davantage de marge de manoeuvre, de liberté de ton ou d'action si nous parvenons à assurer pleinement toutes les dimensions de notre sécurité.
Si entre les deux rives de l'Atlantique, le dialogue est nécessaire et la coopération souvent essentielle, plus de prise de responsabilité et plus d'effort financier à travers un burden sharing mieux ajusté permettront à l'Europe, à travers la PESD, de jouer tout son rôle dans les questions de sécurité, en assumant d'abord sa propre sécurité et ensuite celle de ses voisins. Mais pour atteindre ce but, il faut que les États membres redoublent d'efforts et d'engagement afin de pouvoir s'imposer comme partenaires à part entière des États-Unis.
J'ai parlé de la continuité de la mission de défense collective et de la continuité du couple États-Unis/Europe avec un deuxième partenaire qui construit avec volontarisme sa cohérence interne et affiche de plus grandes ambitions. Il me faut insister sur la continuité du cadre géographique limité de l'Alliance, tant au niveau des membres que des missions. L'Alliance n'a pas pour vocation à s'étendre indéfiniment, à former un club de démocraties de par le monde. L'alliance doit respecter son article 10 et se contenter - la tâche est déjà significative - d'être l'instrument de sécurité de ses États membres, de leur propre sécurité.
En un mot, l'Alliance atlantique a été pendant 50 ans une alliance euro-américaine centrée sur des questions européennes. La fin de la guerre froide n'est donc pas venue bouleverser radicalement la nature profonde de l'Alliance, malgré son élargissement, la création de nouveaux partenariats et l'extension de ses missions. Il ne s'agissait donc pas d'une alliance globale ou qui désirait le devenir, comme on l'entend trop souvent pour l'instant.
C'est bien entendu le 11 septembre 2001 qui a précipité des remises en cause que l'on sentait déjà poindre dans les années 90 dans le chef des Américains : utiliser la boîte à outils politico-militaires que constitue l'Alliance pour lui faire réaliser autre chose que son objet original.
La menace a-t-elle acquis une dimension globale ? L'Alliance doit-elle s'adapter à cette nouvelle globalité de la menace en structurant son existence autour d'elle ? En d'autres termes, est-on dans la même logique que durant la guerre froide : la guerre globale contre le terrorisme, telle que les Américains la qualifient, doit-elle être le principe organisateur central de l'Alliance atlantique ? La globalité de ces menaces impose-t-elle la globalité des déploiements atlantiques - une Alliance qui intervient partout, à tout moment et pour toute question de sécurité ? L'Alliance a-t-elle vocation à s'étendre au-delà de l'Europe ou à ouvrir ses réunions à des non-membres ? Le Conseil de sécurité des Nations unies reste-t-il l'arbitre de la sécurité internationale, malgré sa paralysie en cas de veto ? L'Alliance doit-elle rester fondamentalement multilatérale ou ses membres peuvent-ils agir par petits groupes hors de son cadre et donc relativiser son importance en matière de sécurité ?
Voilà les questions qui sont posées à l'Alliance atlantique et à ses vingt-six États membres depuis le 11 septembre, à Riga et lors des sommets qui suivront. La plus importante, celle qui synthétise toutes les autres, est cette notion de globalité, que certains acteurs au sein de l'OTAN veulent conférer à l'Alliance et qui a été au centre de nos entretiens avec notre ambassadeur auprès de cette organisation. L'OTAN fait preuve d'une certaine boulimie d'activités, alors qu'elle devrait simplement gérer ses compétences politico-militaires euro-atlantiques et assurer le succès de certaines missions ponctuelles.
L'exception est symbolisée par l'intervention en Afghanistan, où il faut s'engager afin que cette mission soit un succès final, même si cette opération passe par des phases de doutes et de remises en question. Je suis d'ailleurs convaincue que ce sera un sujet longtemps débattu à Riga, tant sur le plan de la stratégie militaire à suivre face à la reprise des combats contre les Talibans que sur celui de la solidarité et de la volonté politique de l'Alliance de triompher des difficultés rencontrées.
Cela impliquera des efforts des pays membres en termes d'engagement : notre pays assume ses responsabilités, comme il le fait en même temps sur d'autres théâtres de conflit. Ses engagements doivent-ils se faire au détriment de notre outil de défense ? Je ne le pense pas et il faudra donc un jour se poser la question de savoir comment on finance la poursuite de la modernisation de notre armée et les opérations qu'elle mène à l'étranger. L'un ne doit pas se faire au détriment de l'autre.
Les chefs d'État et de gouvernement doivent saisir l'occasion de cette rencontre pour dresser un bilan des opérations dans lesquelles l'OTAN est engagée en Afghanistan et au Kosovo. La situation militaire et politique y est difficile et la crédibilité de l'organisation est engagée dans ces deux missions. Riga doit donc permettre de donner les impulsions nécessaires pour que nous réussissions ensemble l'une et l'autre, en coopération avec les autres intervenants, l'Union européenne au Kosovo et l'ONU en Afghanistan.
En parallèle avec la nécessité de réussir ces deux missions, certains s'interrogent sur l'opportunité d'étendre les missions de l'Otan dans deux directions : l'une, géographique, en développant le partenariat avec de nouveaux pays ; l'autre, fonctionnelle, en opérant dans le domaine civil, notamment dans la reconstruction de pays sortis de crise.
Sur le plan géographique, il convient en effet de reconnaître la contribution apportée par des pays non membres de l'Alliance aux opérations militaires de celle-ci. Ainsi en est-il de l'Australie, de la Nouvelle-Zélande ou du Japon en Afghanistan, selon des modalités différentes d'ailleurs. Je suis convaincue que l'on peut améliorer les modalités pratiques de leur association aux opérations, sans pour autant changer la nature profonde de l'OTAN qui doit, à mes yeux, demeurer une alliance militaire euro-atlantique.
Le développement d'un « partenariat global » risquerait en effet de diluer la solidarité naturelle entre Européens et Américains du Nord dans un ensemble flou, mais aussi et surtout d'adresser un mauvais message politique : réduction de la portée des partenariats déjà existants, marginalisation des Nations unies et création d'un bloc contre un autre.
Sur le plan des compétences de l'Alliance, une stratégie globale s'impose en Afghanistan, où il est clair qu'une approche exclusivement militaire court à l'échec. Les missions de reconstruction doivent impérativement relever d'organisations qui en ont la compétence, en particulier l'ONU. L'OTAN n'a aucun rôle ni aucune compétence pour reconstruire l'économie ou la démocratie d'un pays. Donnons l'OTAN les moyens d'accomplir ses missions militaires et créons des partenariats avec des organisations civiles qui accompliront ces tâches avec dextérité.
En conclusion, je voudrais insister sur un certain nombre de points.
Incontestablement, l'Alliance a survécu à la révolution géopolitique que constituaient la chute du Mur de Berlin et la fin de la menace soviétique. Notre Alliance a su jouer un rôle fondamental dans la consolidation de la paix sur le continent européen en contribuant de manière décisive à la résolution des conflits dans les Balkans. Cette alliance est efficace pour assurer la paix sur le continent européen depuis plus de soixante ans.
Dans le même temps, l'Alliance a mis en place des outils capacitaires nouveaux, comme la Force de réaction rapide, pour lui permettre de réagir plus rapidement sur tout le spectre des missions susceptibles de se présenter. Le tout, en continuant à développer des partenariats originaux avec l'Union européenne, dans sa dimension de sécurité et de défense comme on le voit en Bosnie, et sur un autre plan, avec la Russie, avec l'Ukraine et avec les autres membres du Partenariat pour la Paix, qu'ils soient ou non candidats à rejoindre l'Alliance.
Ma conviction profonde, c'est qu'un lien transatlantique fort demeure notre intérêt et que les États-Unis sont nos alliés et nos amis. À mes yeux, on ne saurait en effet concevoir de défense européenne contre les États-Unis. Pour rester vivante, l'Alliance a besoin d'un pilier européen fort dans lequel nous avons un rôle essentiel à jouer. « L'Europe puissance », l'Europe politique ne peut se constituer qu'en coopération avec les États-Unis et non contre eux. Cela n'implique bien sûr aucunement un quelconque lien de vassalité, mais un vrai partenariat ambitieux, qui par-delà les discours, nécessite de la part des Européens des efforts soutenus en matière de défense.
Ce pilier européen de l'Alliance est affaibli par l'arrêt de la ratification de la Constitution européenne et le gel de facto des importantes avancées que contenait le Traité en matière de défense européenne. Il faut donc s'engager résolument dans la poursuite de la réforme de l'Union qui passe pour l'instant, en attendant une solution miracle, par l'adoption de la Constitution européenne. C'est en s'engageant ainsi que l'Union européenne apportera sa pleine contribution à la solidarité transatlantique qui est un des éléments constitutifs de notre sécurité.
Riga doit marquer une nouvelle étape dans l'adaptation de l'Alliance. Nous obtiendrons ce résultat en préservant la légitimité même de l'OTAN en tant qu'organisation militaire garante de la sécurité collective des alliés européens et nord-américains. Chercher à engager l'Alliance dans des missions non militaires, dans des partenariats à la carte, dans un élargissement insuffisamment préparé ne pourrait que dénaturer sa vocation et, au bout du compte, diminuer son efficacité. Cela, nous ne le voulons pas.
M. Pierre Galand, corapporteur. - Je voudrais tout d'abord remercier Jihane Annane pour la clarté de sa présentation et pour le travail qu'elle a réalisé durant toutes ces auditions. Nous avons pu, entre rapporteurs, aboutir à des conclusions qui ont permis un travail positif en commission des Affaires étrangères. Nous soutenons tous le rapport et les recommandations qui vous sont présentés aujourd'hui.
Il m'appartient de vous présenter la deuxième partie des auditions organisées par la commission. Le 27 juin dernier, M. Bozo, professeur à la Sorbonne, a inscrit son exposé dans l'évolution historique et stratégique de l'Alliance atlantique. Il a notamment indiqué que, même si cette dernière se situe désormais dans une phase d'apaisement de la crise qui l'a touchée lors du déclenchement de la guerre en Irak, elle n'en traverse pas moins actuellement une période d'interrogation sur sa transformation éventuelle.
Lors de l'échange de vues, ma collègue Jihane Annane a d'ailleurs demandé au professeur si le terrorisme a sa place au centre des préoccupations de l'OTAN. Le Pr Bozo a répondu qu'il convient surtout de savoir s'il faut combattre le terrorisme par des moyens militaires ou pas, et qu'il faut au préalable définir la nature de cette lutte. Interrogé ensuite sur l'élargissement de l'Alliance, le professeur a répondu que, plus on élargira, plus l'article 5 de la Charte sera relatif.
Répondant ensuite à Mme Zrihen, le professeur a souligné que la politisation de l'Alliance, dans la mesure où il s'agirait de faciliter la fonction principale - militaire - de l'Alliance, pourrait rencontrer deux limites : celle de la légitimité et celle de la légalité internationale.
Enfin, le président, M. Roelants du Vivier, a demandé s'il existe un risque de contradiction entre l'OTAN et la politique extérieure de sécurité commune. Le Pr Bozo a estimé qu'un scénario à long terme qui consisterait pour l'Alliance à concurrencer l'Union européenne, ne serait certainement pas un succès.
Nous avons ensuite entendu les exposés de M. Remacle et de Mme Delcourt, tous deux professeurs à l'Université Libre de Bruxelles, au cours desquels M. Remacle a insisté sur le fait que les relations entre l'OTAN et l'Union européenne sont fortement perturbées à cause de la concurrence que se font ces deux organisations sur le terrain, comme par exemple au Soudan. Le Pr Delcourt a pour sa part consacré son exposé à l'examen des relations entre l'OTAN et les Nations unies, au regard de l'évolution du concept de sécurité et de ses différentes manifestations, ainsi que des questions fondamentales de la légitimité du recours à la force dans les relations internationales.
Lors de l'échange de vues, le Pr Remacle a répondu à Mme Zrihen, au sujet du concept de globalisation stratégique, que la puissance dominante des États-Unis, la seule puissance qui pense en termes globaux et qui en a les moyens, inscrit sa vision de l'OTAN dans cette démarche. À la question de la politisation de l'agenda de l'Alliance, il a été répondu qu'elle est voulue par certains acteurs, les États-Unis en tête bien entendu. Par ailleurs, en ce qui concerne le leadership politique au sens civil à l'OTAN, le professeur estime que le Conseil de l'Atlantique Nord est sans aucun doute prédominant par rapport aux logiques militaires.
Interrogé par Mme Annane à propos du « Berlin Plus », le Pr Remacle a indiqué qu'il demeure un processus asymétrique dans lequel l'Europe a besoin de l'OTAN alors que ce n'est pas le cas des États-Unis. C'est aussi selon lui un moyen de maintenir une forme de contrôle de l'Europe par les États-Unis. Lorsque, pour ma part, je lui ai demandé si la NATO Response Force (NRF) n'est pas un moyen supplémentaire pour engranger davantage de dépenses militaires, le Pr Remacle a répondu que chaque dispositif inventé serait finalement un moyen de faire indirectement payer davantage les Européens pour leur propre sécurité, celle des États-Unis, ou la politique interventionniste de ces derniers que nous ne contrôlerions pas suffisamment.
À la question de Mme Annane relative à la nature des relations entre l'ONU et l'OTAN, le professeur Delcourt a expliqué que les organisations régionales, parmi lesquelles l'OTAN, avaient tendance à s'émanciper du système des Nations unies.
La commission des Affaires extérieures et de la Défense a ensuite entendu l'exposé de M. Duqué, représentant permanent de la France auprès de l'OTAN. Il a présenté la contribution importante de son pays dans le cadre de l'Alliance, même si la France n'appartient pas à la structure intégrée et, de ce fait, ne participe pas à l'exercice de planification de défense. Interrogé par Mme Zrihen et moi-même sur le « hors zone », M. l'ambassadeur a indiqué que le concept est dépassé et que l'Alliance est appelée à intervenir sous mandat du Conseil de sécurité de l'ONU pour contribuer à la stabilité et à la sécurité des pays en difficulté.
Revenant sur la question de la politisation du Conseil, M. Duqué a précisé à Mme Zrihen qu'il s'agissait bien d'une enceinte de débat politique. Pour lui, cela ne pose aucun problème pour autant que l'on ne cherche pas à aboutir à des décisions ou des conclusions : « Il s'agit seulement d'échanges de vues et d'informations réciproques qui sont utiles mais ne visent pas à définir une politique commune. »
Le 3 juillet dernier, la commission des Affaires extérieures et de la Défense du Sénat siégeant conjointement avec la commission des Affaires étrangères de la Chambre a procédé à l'audition de M. De Hoop Scheffer, secrétaire général de l'OTAN. Celui-ci nous a retracé l'évolution de l'OTAN en insistant notamment sur le fait que le prochain défi à relever est celui de l'établissement d'un véritable partenariat avec l'Union européenne. M. Roelants du Vivier a demandé au secrétaire général s'il ne craignait que l'OTAN ne devienne une ONU bis, sans en avoir la légitimité. Il a par ailleurs soulevé la question de l'opportunité de créer ou non un marché transatlantique en matière de défense. M. Dubié a demandé pourquoi l'on n'applique pas le traité tel qu'il est.
Dans ses réponses, le secrétaire général a indiqué qu'il était clair que l'OTAN reste l'OTAN, que le traité de Washington reste le traité de Washington et que l'article 5 reste l'article 5. Ce sont ses propres paroles. Par ailleurs l'OTAN en tant que telle ne s'occupe pas du marché des armes.
Le 11 octobre dernier, la commission des Affaires extérieures et de la Défense a entendu M. Lammerant, membre du Forum voor Vredesactie ainsi que M. Ghys, responsable du CNAPD. M. Lammerant a fait remarquer que les différents points de l'agenda du sommet de Riga risquent de faire de l'Alliance une organisation de sécurité globale et collective, précisant que le Forum voor Vredesactie est opposé à une telle évolution et refuse également le financement commun des opérations de l'OTAN. M. Ghys a indiqué qu'il partageait cette vision et a insisté sur le respect strict de la Charte des Nations unies. En outre, le CNAPD est fortement opposé au rééquilibrage militaire qui signifierait certainement une augmentation du budget militaire de l'Europe.
Lors des échanges de vues j'ai eu l'occasion d'interroger les deux orateurs sur la possibilité de doter l'OTAN d'un pilier européen, M. Lammerant a répondu qu'il s'agissait d'une illusion, estimant que l'Union européenne devait se concentrer sur des objectifs réalisables comme les missions civiles. Mme Hermans estime, quant à elle, qu'il est nécessaire d'adapter l'OTAN au nouveau contexte international et qu'il faut créer un équilibre entre les États-Unis et l'Union européenne. M. Dubié est intervenu pour souligner que le traité de l'OTAN va à l'encontre de l'unilatéralisme en renvoyant à la charte de l'ONU. Il s'est par ailleurs inquiété de l'évolution de la situation en Afghanistan.
Enfin M. Wille a fait observer que la sous-commission de la Défense du Parlement européen consulte tous les parlements nationaux mais non l'Union de l'Europe occidentale, organisation qui doit pourtant exécuter la politique de défense de l'Union européenne.
J'en viens à présent aux recommandations qui ont été formulées par la commission des Relations extérieures et de la Défense, et qui ont rédigées de manière très constructive par Mmes Annane et de Bethune, et moi-même. Je ne reviendrai pas sur le contenu des recommandations, j'évoquerai simplement les points essentiels, selon le groupe socialiste, de ce texte équilibré.
En ce qui concerne le rôle de l'OTAN, nous insistons sur le fait que celle-ci doit définir son rôle et ses missions dans le respect du Traité de l'Atlantique Nord. Dès lors, le rôle de l'OTAN doit demeurer la défense collective de ses pays membres, telle qu'affirmée par l'article 5 de son Traité. Il est évident que le contexte international a connu d'importants changements depuis la création de l'OTAN en 1949. Celle-ci doit donc s'adapter au nouveau contexte de l'après-guerre froide. Mais l'Alliance ne doit pas se concevoir comme le « gendarme du monde ». C'est pourquoi le rôle de l'OTAN doit rester celui d'une organisation de défense collective et non de sécurité collective, domaine qui reste du ressort du Conseil de sécurité. Il est donc essentiel de réaffirmer la primauté des Nations unies, et en particulier du Conseil de sécurité, en matière de maintien de la paix et de sécurité internationale. Il convient à cet effet de renforcer l'Organisation des Nations unies comme organisation internationale centrale garante du maintien de la paix au niveau mondial. J'insiste sur cet aspect parce que la Belgique participera au Conseil de sécurité à partir du 1er janvier 2007. Elle pourrait dégager un axe de travail au cours de sa participation et faire de ce point une de ses priorités.
Il est d'ailleurs utile de rappeler que l'OTAN demeure une organisation régionale ; de ce fait, ses missions doivent se limiter au territoire de la zone transatlantique, sauf en cas d'évocation de l'article 5 ou de mandat particulier des Nations unies.
Il convient également de rappeler que l'OTAN est une organisation militaire. Elle n'a donc pas pour vocation de mener en tant que telle des opérations humanitaires ou de reconstruction dans des pays touchés par un conflit armé. Cela n'exclut en rien la possibilité pour l'OTAN de mettre certaines de ses capacités au service de toute autre organisation compétente dans ces domaines afin d'intervenir le plus rapidement et le plus efficacement possible. Nous estimons qu'il y aurait un risque de confusion des tâches et de manque de coordination dans les opérations humanitaires.
Rappelons que lorsque, pour la première fois de son histoire, l'OTAN aurait pu agir en vertu de l'article 5 de son Traité, à savoir la défense collective après une attaque contre l'un de ses membres le 11 septembre 2001, les États-Unis ont refusé et ont préféré former une coalition de pays volontaires.
L'OTAN montre depuis quelques années déjà son intention de jouer un rôle central dans la lutte contre le terrorisme. Or, pour le groupe socialiste, les actions militaires ne constituent pas la meilleure ni même l'unique réponse au problème du terrorisme. Ce phénomène requiert une approche multidimensionnelle qui ne peut être rencontrée dans le cadre d'une alliance militaire. Il apparaît donc plus approprié de privilégier la prévention, laquelle doit viser les racines du terrorisme. Je rappelle à cet égard que, lorsque nous avons entendu les experts des Nations unies pour la rédaction de notre rapport sur la contribution belge à la réforme des Nations unies, ces derniers avaient exactement la même position.
Pour nous, l'intervention militaire ne doit être envisagée qu'en dernier recours. Confier l'ensemble de ce problème à l'OTAN n'apportera qu'une réponse sécuritaire et militaire, sans se pencher sur les causes profondes du phénomène, à savoir la pauvreté, le sous-développement et tous les problèmes récemment traités lors de la Conférence sur l'environnement.
En ce qui concerne l'élargissement de l'Alliance, autre thème faisant l'objet de débats, rappelons qu'au terme de l'article 10 du Traité de Washington, celui-ci n'est possible que vis-à-vis d'États européens et nécessite l'accord unanime de toutes les parties.
Il convient également de prendre en considération toutes les implications que l'adhésion de certains pays en conflit armé avec leurs voisins non membres de l'OTAN pourraient avoir sur l'Alliance et principalement sur son obligation d'assistance en cas d'attaque d'une autre partie. À cet égard, je voudrais aussi attirer l'attention sur les risques que l'OTAN passe une série d'accords de partenariat, en particulier avec des pays en guerre. Je pense aux accords récemment conclus dans le cadre du dialogue méditerranéen avec Israël.
Je suis particulièrement choqué de constater qu'au moment où se termine la guerre du Liban et où se produit l'agression inqualifiable d'Israël dans les territoires palestiniens, en particulier à Gaza, le secrétaire général de l'OTAN, M. Alessandro Minuto Rizzo, s'est rendu en Israël et s'est permis de prononcer un discours dithyrambique sur les nouvelles alliances entre l'OTAN et Israël, accord qui, selon lui, devrait donner un nouvel élan à notre coopération. Il s'agit très clairement, comme le dit M. Minuto Rizzo lui-même, de lutte contre le terrorisme. Je ne vois pas comment nos partenaires de l'autre rive de la Méditerranée interpréteront un tel engagement de l'OTAN avec un partenaire coupable, aujourd'hui, de crimes contre l'humanité dans les territoires de Gaza.
Il convient également de se pencher sur le principe de financement des missions de l'OTAN qui doit rester celui du « costs lie where they fall ». Autrement dit, les pays qui s'engagent dans une mission doivent en supporter les coûts. Le financement commun des opérations par les membres obligerait notre pays à participer aux frais de missions qui ne le concernent pas.
Par ailleurs, nous sommes totalement opposés à une augmentation du pourcentage de PIB consacré à la Défense qui ne soit pas liée à une augmentation de notre PNB. Une telle augmentation n'est en effet pas prévue dans l'accord de gouvernement et il est totalement déraisonnable de penser que la Belgique serait en mesure de le faire sans compromettre l'équilibre et l'ensemble du budget.
Je terminerai mon exposé en vous rappelant que, pour le groupe socialiste, l'Union européenne et l'OTAN sont complémentaires. Le développement de la politique européenne de sécurité et de défense contribue à la création d'un véritable pilier européen au sein de l'OTAN et, de ce fait, au renforcement de cette dernière par un plus grand équilibre entre les piliers américain et européen. Toutefois, cela ne peut se faire que dans le respect des principes que nous voulons respecter.
En ce sens, je me réjouis que nos recommandations mettent notamment l'accent sur la nécessité de transparence au sein de l'Alliance afin de garantir un meilleur contrôle parlementaire.
Dans nos recommandations, nous avons veillé, et je m'en réjouis, à redonner vigueur au traité de non prolifération et à assurer la mise en oeuvre du traité d'interdiction complète des essais nucléaires. Nous avons également pu nous pencher sur nos obligations en ce qui concerne la sixième conférence d'examen de la convention sur l'interdiction des armes biologiques qui doit se tenir à la fin de cette année, ainsi que sur les questions de la convention relatif à la destruction des armes chimiques qui doit être terminée avant l'année 2012.
Madame la présidente, chers collègues, les recommandations soumises aujourd'hui au vote de cette assemblée, préalablement votées à l'unanimité des membres présents au sein de la commission des Relations extérieures et de la Défense, reflètent de manière équilibrée l'ensemble des préoccupations que nous avons partagées durant ce long travail d'audition. C'est la raison pour laquelle mon groupe lui apportera son plein soutien qui, je l'espère, sera partagé par l'ensemble de cette assemblée.
Mevrouw Sabine de Bethune (CD&V), corapporteur. - De komende Top van Riga vormt een mijlpaal in de evolutie van de NAVO en de Senaat en de commissie voor de Buitenlandse Betrekkingen en voor de Landsverdediging hebben deze gelegenheid terecht aangegrepen om over dit thema hoorzittingen te houden en een rapport, met aanbevelingen, op te maken.
Het verslag is afdoende voorgesteld en geduid door collega Annane en collega Galand, die ik daarvoor hartelijk dank. Als corapporteur zal ik enkel op een paar punten terugkomen.
Eerst echter wil ik de twaalf binnenlandse en buitenlandse sprekers bedanken voor hun interessante visie die ze tijdens de hoorzittingen met ons hebben gedeeld. Deze twaalf eminente sprekers hebben vanuit hun expertise en specifieke invalshoek de evolutie en de mogelijke toekomstige rol van de NAVO op een klare en duidelijke manier geschetst. Meer in het bijzonder wil ik twee sprekers bedanken, omdat ze zich in volle voorbereiding voor de Top van Riga hebben vrijgemaakt om hun kennis met ons te delen en op onze vele vragen te antwoorden: NAVO-secretaris-generaal De Hoop Scheffer, met wie we op 3 juli 2006 samen met de commissie voor de Buitenlandse Betrekkingen en de commissie voor de Landsverdediging van de Kamer een hoorzitting organiseerden die meer dan verhelderend was, en ambassadeur Struye, de permanente vertegenwoordiger van België bij de NAVO, die in de eerste van onze hoorzittingen de spits afbeet.
In zijn heldere uiteenzetting schetste ambassadeur Struye meteen het probleem en de uitdagingen waarmee de NAVO wordt geconfronteerd. Op die manier gaf hij onze commissie ook het kader waarbinnen we onze aanbevelingen konden formuleren.
De afgelopen decennia zijn we met zijn allen getuige geweest van historische en ingrijpende veranderingen in de wereldverhoudingen. Mevrouw Annane is er uitgebreid op ingegaan. Niemand kon zich voorstellen dat de val van de Berlijnse Muur in 1989 dergelijke vergaande implicaties zou hebben. Europa is nu immers diepgaander geïntegreerd dan ooit tevoren. Met de uitbreiding van de Europese Unie zijn we opnieuw een stap dichterbij het doel dat de grondleggers Robert Schuman en Jean Monnet in 1950 voor ogen hadden: een verenigde Europees continent waar stabiliteit en vrede heersen. Het einde van de Koude Oorlog heeft echter ook tot verschuivingen in de internationale verhoudingen geleid. De bipolaire wereldorde ligt definitief achter ons en de globalisering zet zich met rasse schreden voort. De aarde van de dreiging veranderde echter ook.
Dat heeft gevolgen voor Europa, dat zijn weg zoekt in de multipolaire wereld. De potentiële `vijand' heeft niet meer de vorm van een traditionele natiestaat. De veiligheid wordt nu bedreigd door massavernietigingswapens, mensenhandel, terrorisme, falende staten, etnische conflicten enzovoort. Kortom, de oorzaken van instabiliteit en onveiligheid zijn zeer verscheiden en vereisen vaak een multidimensionale aanpak.
Radicaal veranderde tijden vragen om een radicale aanpassing van de manier waarop Europa met veiligheid omgaat. Destijds slaagde Pierre Harmel erin het veiligheidsbeleid van de NAVO te verbreden tot een langetermijnbeleid dat op basis van economische, politieke en militaire toenadering tot een algemene Europese regeling wilde komen. Het veranderde veiligheidsbeleid van vandaag heeft ook nood aan een gelijkaardige oefening, te meer daar de visies over de toekomstige rol van de NAVO vaak verschillend zijn.
In 1948 nam ons land duidelijk de optie om af te stappen van een louter nationaal georganiseerde defensie. Ook vandaag blijven we achter deze beslissing staan, want het transatlantisch bondgenootschap heeft ons de afgelopen vijftig jaar gevrijwaard van een gewapend treffen en stond bijgevolg borg voor vrede, veiligheid en welvaart.
Hoewel de NAVO in de eerste plaats een militaire organisatie is, toch heeft de veranderde veiligheidssituatie ertoe geleid dat ze meer en meer moet worden gezien als een forum voor trans-Atlantische politieke veiligheidsdialoog. Meer en meer worden onderwerpen zoals het vredesproces in het Midden-Oosten en de nucleaire opbouw in Noord-Korea en Iran besproken, juist omdat ze gevolgen hebben voor de veiligheid van het Euro-Atlantisch grondgebied.
De cruciale vraag waarover de NAVO-lidstaten thans nadenken is in hoeverre uit deze dialoog concrete taken voortvloeien en waar de grens ligt. Dit denkproces is nog complexer, omdat de taken van de NAVO moeten worden afgelijnd ten aanzien van de taken van de Europese Unie en van de Verenigde Naties. Kortom, er komen vele politieke vragen op de NAVO af waaruit in de komende jaren een nieuwe richting moet ontstaan.
In 1999 hebben de Europese leiders besloten dat het Gemeenschappelijk Buitenlands- en Veiligheidsbeleid versterkt moest worden ten einde tot een geloofwaardig Europees defensiebeleid te komen. Het is voor CD&V primordiaal dat de Europese Unie in staat is om een gemeenschappelijk buitenlands- en veiligheidsbeleid te formuleren waarop een gemeenschappelijk defensiebeleid kan worden gesteund. Tegelijk beseffen we dat de Europese Unie alleen stapsgewijze tot een volwaardige wereldspeler op het vlak van defensie en veiligheid kan uitgroeien. We menen dan ook dat een sterke Europese pijler binnen de NAVO noodzakelijk is.
In het kader van het zogenaamde Berlijn Plus-pakket, dat ook in 1999 werd bediscussieerd, werden tussen de Europese Unie en de NAVO afspraken gemaakt over meer samenwerking. CD&V is voorstander van een verdere uitbouw van de Europese Defensie Identiteit in het kader van de trans-Atlantische alliantie. Dit is immers de hefboom om te komen tot een optimale Europese coördinatie in de besluitvorming en de taken binnen de NAVO. We menen dan ook dat een nauwere samenwerking tussen de EU en de NAVO op termijn moet uitmonden in een eigen EU-vertegenwoordiging in de NAVO.
We zijn ervan overtuigd dat de gecombineerde middelen van de EU en de VS thans nog altijd een ongeëvenaarde kracht vormen die in staat is een doeltreffend global governance te dragen en een afdoend antwoord te bieden voor de nieuwe veiligheidsuitdagingen. Dit is maar mogelijk op voorwaarde dat beide partners daartoe de wil opbrengen en op voet van gelijkheid willen werken. Solidariteit en gelijkwaardigheid moeten het verhaal van de NAVO zijn.
Hoewel CD&V veel belang hecht aan de uitbouw van een eigen Europese defensiekracht en van een Europese pijler in de NAVO, blijven we van mening dat de Verenigde Naties het belangrijkste mondiale veiligheidskader zijn, waarin wordt gezocht naar een gemeenschappelijke aanpak van de nieuwe uitdagingen en die effectief wordt uitgewerkt. De eerste stap naar een effectief en legitiem beheer van de internationale veiligheid, waartoe de wereldleiders in september 2005 de eerste hervormingen hebben doorgevoerd, is de versterking van de instellingen van de Verenigde Naties.
De nieuwe veiligheidsuitdagingen vereisen immers een efficiënte inzet en een zo breed mogelijk gedragen engagement.
Efficiënt betekent dus ook dat de NAVO als een bestaande structuur moet kunnen worden ingezet bij operaties ter bevordering van de internationale veiligheid, ook buiten het NAVO-gebied en buiten de klassieke bevoegdheden van de NAVO. Uiteraard moeten deze operaties hun grondslag vinden in VN-resoluties. In het verlengde hiervan is het ook noodzakelijk dat de NAVO bijkomend in de toekomst de juiste en voldoende capaciteiten ontwikkelt voor ondersteunende taken of veiligheidstaken op het gebied van humanitaire bijstand en ontwikkelingssamenwerking.
De taak van de NAVO mag niet worden beperkt tot een reactieve of curatieve benadering van een veiligheidsprobleem. Bedreigingen kunnen immers ook voorkomen worden. Dergelijke missies moeten altijd in opdracht en ten dienste van de Verenigde Naties worden uitgevoerd.
CD&V steunt de aanbevelingen van de commissie voor de Buitenlandse Betrekkingen en voor de Landsverdediging. We hebben geprobeerd na belangrijke hoorzittingen en interessante gedachtewisselingen eensgezinde aanbevelingen te formuleren. De voorliggende aanbevelingen komen grotendeels tegemoet aan de verwachtingen van CD&V. Het trans-Atlantische bondgenootschap moet immers niet alleen hervormd worden als een forum voor de strategische en politieke coördinatie. In de aanbevelingen wordt ook voldoende aandacht besteed aan de rol van de Europese Unie binnen de NAVO. De transformatie gaat voor CD&V ook verder. De nieuwe veiligheidsuitdagingen, de militaire voorbereiding en de relatie met de Verenigde Naties, met de Europese Unie en de partnerships met derde landen, moeten ook aan bod komen. Ook aan deze aanbevelingen komen de aanbevelingen van de Senaat tegemoet.
CD&V is ervan overtuigd dat de NAVO de komende jaren voor de Europese veiligheid van fundamenteel belang blijft. Het is een bevoorrecht overlegorgaan. CD&V hoopt dan ook dat de voorliggende aanbevelingen voor de top van Riga door de Belgische regering zullen worden meegenomen en als richtsnoer zullen worden gebruikt.
M. Christian Brotcorne (CDH). - Je m'associe aux remerciements qui ont été adressés aux rapporteurs et je félicite la commission pour le travail qu'elle a effectué. Je me réjouis que nous ayons pu aboutir à ces recommandations dans une matière aussi délicate que celle-ci.
Quelle est l'ambition d'un mécanisme de sécurité collective comme celui de l'Organisation de l'Atlantique nord, si ce n'est de promouvoir la paix et la sécurité mondiales, au Nord comme au Sud, en s'attaquant aux causes de l'insécurité et en garantissant le respect du droit international, des droits humains et des valeurs universelles ?
Depuis la fin de la guerre froide et de son équilibre bipolaire, les guerres du Kosovo, d'Afghanistan, d'Irak ou, plus récemment, du Liban ont marqué la résurgence d'un clivage entre partisans de l'unilatéralisme et du multilatéralisme. Le CDH attache la plus grande importance au multilatéralisme, maintes fois réaffirmé par l'Union européenne, et au respect du droit dans les relations internationales, qui sont les meilleures garanties de la paix.
La fin de la guerre froide a également modifié le paysage de la sécurité internationale et fait ressentir le besoin d'un nouveau modèle de sécurité adapté aux menaces contemporaines. Plus que jamais, le modèle de sécurité doit être celui de la sécurité collective, doté de moyens de vérification et de contrôle importants et d'institutions aux rôles clairement définis.
Ce dernier principe est fondamental pour aborder « l'évolution » ou la « transformation » de l'OTAN, quel que soit le nom qu'on lui donne. En effet, la question de l'évolution de l'OTAN est un débat qui - parmi les États membres - voit s'affronter deux écoles en vue du sommet de Riga qui se tiendra tout prochainement. L'une propose une place privilégiée à l'OTAN, conçue comme une organisation mondiale de gestion de crises ; l'autre défend une vision plus pragmatique de l'OTAN conçue comme instrument complémentaire et cohérent de la PESD.
Pour le CDH, la PESD est et doit être renforcée en tant que forum prioritaire concernant la sécurité et la défense des États membres de l'Union européenne. L'OTAN reste l'outil premier de la collaboration transatlantique en termes de sécurité et de défense, mais son évolution ne peut, en aucun cas, mener à une remise en cause du mécanisme de sécurité collective tel que prévu par la Charte des Nations unies.
Je soulignerai quelques points très importants, pour moi-même et pour mon parti, en ce qui concerne les recommandations que nous adoptons.
Tout d'abord, l'OTAN conserve sa mission d'assurer la défense de ses membres en cas d'agression dirigée contre l'un d'eux. Il convenait de rappeler l'article 5 du Traité de l'Atlantique nord afin d'exclure toute interprétation favorable à la notion de guerre préventive. Par ailleurs, en vertu de l'article 53 de la Charte des Nations unies « aucune action coercitive ne sera entreprise en vertu d'accords régionaux ou par des organismes régionaux sans l'autorisation du Conseil de sécurité ». Il s'agit d'un point fondamental : l'OTAN, si elle déploie des moyens coercitifs, doit y avoir été préalablement autorisée par les Nations unies.
Dans l'hypothèse d'une action non coercitive, le Conseil peut approuver une opération militaire a posteriori. Dans ce cas, le Conseil de sécurité supervise l'action des organismes régionaux.
Nous avons entendu à plusieurs reprises, notamment à l'occasion des journées diplomatiques, notre ministre des Affaires étrangères déclarer qu'il fallait un mandat « en principe ». Le simple fait d'ajouter « en principe » ouvre la porte à l'idée que le mandat pourrait arriver a posteriori quand il s'agit d'une action coercitive. Nous ne sommes pas d'accord avec cette façon de voir. L'autorisation du Conseil de sécurité est et doit rester un préalable.
Dans le même esprit, le CDH n'est pas favorable à une répartition des tâches qui verrait l'OTAN consacrée en matière de lutte contre le terrorisme ou qui consacrerait une répartition géographique. Nous sommes opposés aux guerres préventives, notamment contre le terrorisme. Nous soutenons que la lutte contre le terrorisme et contre la prolifération nucléaire nécessite un cadre multilatéral « universel ».
Globalement, nous sommes heureux de constater que les recommandations rappellent le rôle central du Conseil de sécurité et le rôle défensif de l'Alliance en vertu de l'article 5 du traité. Pour le CDH, aucune organisation régionale, qu'il s'agisse de l'OTAN ou d'une autre, ne peut prétendre s'émanciper des règles établies par la Charte des Nations unies.
Concernant la recommandation qui invite les autres États membres de l'OTAN à adopter une législation similaire à la nôtre en matière d'armes à sous-munitions, je rappelle que M. Kofi Annan et son secrétaire général adjoint aux Affaires humanitaires ont appelé, cette semaine, à un gel immédiat de l'utilisation des bombes à sous-munitions qui peuvent, pendant des années, faire courir des risques aussi importants que les mines antipersonnel.
Depuis l'effondrement du communisme dans les années nonante, la question des tâches et fonctions de l'OTAN est effectivement posée. Chaque fois qu'un problème surgit, elle est résolue par l'adoption de concepts vagues : le concept stratégique en 1999 et, tout récemment, le Comprehensive political guidance. Ces concepts contribuent à métamorphoser l'OTAN. Ils sont adoptés lors de sommets entre chefs d'État sans donner lieu à une quelconque révision du traité. Il est évident, comme l'a encore déclaré il y a peu de temps l'ancien ministre allemand des Affaires étrangères, M. Joschka Fischer, que le procédé est utilisé pour ne pas modifier le traité afin d'éviter les débats publics ou les oppositions politiques entre États membres de l'organisation. Cette situation ne contribue malheureusement pas à rendre les activités de l'OTAN plus transparentes. Elle alimente en outre la méfiance du public à son égard. Nous aimerions que les adaptations et les modifications de concepts fassent l'objet de véritables débats politiques et de décisions du même ordre pour garantir la légitimité et la transparence.
Les débats menés en commission et, ce matin, dans cet hémicycle, ainsi que les recommandations que nous soumettrons cet après-midi au vote en séance plénière permettent de remédier en partie à ces difficultés liées, notamment, à la transparence et à la légitimité des modifications relatives à l'évolution des concepts à l'intérieur de l'organisation.
Nous devrons certainement revenir, notamment après le sommet de Riga, sur d'éventuelles autres évolutions, voire sur d'éventuelles décisions qui auraient été prises. Le débat ne fait que commencer.
M. François Roelants du Vivier (MR). - Je vous prends à témoin, madame la présidente, pour souligner que le débat que nous menons ce matin témoigne du rôle singulier et éminent que le Sénat doit jouer en matière de relations internationales. Je regrette d'autant plus l'absence, au sein de notre assemblée, des ministres des Affaires étrangères et de la Défense. Il eût été utile qu'ils se joignent à nous, vu l'importance du travail réalisé par notre commission et, ce matin, par le Sénat dans son ensemble.
Cela ne m'empêche nullement de féliciter les trois rapporteurs qui, au départ d'un important travail personnel, ont permis de créer le consensus auquel nous sommes parvenus à la fin de nos travaux.
Comme j'ai eu l'occasion de le mentionner au cours d'une de nos récentes réunions, lorsque je me suis rendu à Helsinki à la fin du mois d'octobre pour participer à une réunion des présidents des commissions de la Défense, j'ai interrogé mes collègues pour savoir s'ils avaient réalisé, dans leur parlement, un exercice similaire au nôtre. J'ai été étonné de constater que nous étions les seuls à l'avoir fait. Je participe, demain, au Québec, à l'assemblée parlementaire de l'OTAN ; j'y présenterai le rapport et les recommandations du Sénat, qui illustrent bien le travail effectué par notre assemblée.
À la suite des auditions et de la rédaction de nos recommandations au gouvernement, la pertinence de ce débat et de nos réflexions m'apparaît de façon encore plus nette.
En effet, l'Alliance atlantique évolue au fil des modifications du paysage stratégique européen et mondial. Notre environnement de sécurité s'est modifié à tel point que nous perdons parfois le fil conducteur de cette évolution. Après quarante-cinq ans de guerre froide, après une période pendant laquelle les acteurs et les règles du jeu étaient connus de tous, nous sommes confrontés depuis une quinzaine d'années à un paysage stratégique tout à fait différent et très mouvant, au sein duquel la sécurité de notre pays et de ses alliés est en perpétuelle redéfinition.
L'Alliance atlantique, qui est le creuset de notre sécurité, doit s'adapter à ces évolutions successives. C'est d'ailleurs ce qu'elle fait. Depuis le sommet de Londres, organisé en juin 1990, l'Alliance est passée d'une approche sécuritaire défensive réactive à une approche plus proactive, focalisée sur la diffusion de la sécurité et de la stabilité. Elle a tendu la main aux ennemis d'hier. Elle a pris en compte la réalité européenne naissante et elle a redéfini sa doctrine nucléaire en plaçant ses armes nucléaires dans un statut d'armes de dernier recours.
L'ambassadeur Struye de Swielande, notre représentant permanent auprès de l'OTAN, nous a expliqué que si le sommet de Londres avait été une réponse à la fin de la guerre froide, le sommet de Prague de 2002 avait été une réponse aux attaques terroristes du 11 septembre 2001 contre les États-Unis, en insistant sur le besoin de nouvelles capacités militaires pour les alliés.
Depuis cette date, l'OTAN donne l'impression de se chercher un nouveau rôle, de nouvelles missions, de nouveaux théâtres d'opération - à la demande des Nations unies, dans le cas de l'Afghanistan -, de se chercher de nouveaux membres, de nouveaux partenaires. Cette extension tous azimuts de l'OTAN intrigue, pose des questions et peut susciter un sentiment d'inquiétude.
Pour ma part, j'ai été pleinement rassuré d'entendre, d'une part, le souhait de la Belgique de voir l'OTAN rester une institution à vocation politico-militaire, un domaine sur lequel elle doit concentrer ses activités et, d'autre part, les propos d'un haut fonctionnaire de l'Alliance, selon lequel l'OTAN n'a pas de rôle à jouer dans la lutte contre le terrorisme.
Ma conviction, partagée par le groupe MR, est que l'OTAN doit rester ce qu'elle est, c'est-à-dire une institution basée sur l'article 5 du Traité de Washington ou la défense de ses États membres. Vu les moyens militaires dont l'OTAN dispose, elle peut, à la demande du Conseil de sécurité des Nations Unies, apporter une contribution plus active à la paix et jouer un rôle pertinent dans la politique de sécurité mondiale.
Si les menaces qui existaient par le passé unissaient les alliés, les menaces actuelles sont susceptibles de les diviser, comme l'a montré la crise de l'Irak en 2003. Il est dès lors essentiel qu'une vision commune, qu'une compréhension commune, qu'un sens commun de la mission sous-tendent les rôles et les capacités de l'OTAN. Il est donc plus important encore que le dialogue politique au sein de l'Alliance soit constructif et que les alliés renforcent la composante politique de l'OTAN. Une unité de vue sur l'état des menaces et sur les réponses politiques et militaires à apporter est fondamentale. Je pense que cette dimension politique de l'Alliance va permettre de renforcer le lien transatlantique et d'aplanir les différences avec notre allié américain.
Ce dialogue politique doit permettre également à chaque État membre de marquer sa différence sur des évolutions de l'OTAN qui sont sur la table, à l'initiative de certains États membres ou du secrétaire général. Pour être plus précis, deux de ces propositions me paraissent très ambitieuses, sans doute trop. De plus, elles n'entrent pas dans le cadre naturel des fonctions existantes de l'OTAN, d'où sans doute l'absence de consensus sur ces points à Riga. L'avenir le démontrera.
La première concerne l'extension des compétences de l'Alliance afin de pouvoir atteindre par elle-même des objectifs civils. Une saine articulation entre missions militaires et missions d'assistance et de reconstruction, dans le cadre d'une stratégie globale, en Afghanistan, par exemple, est nécessaire. Il est clair qu'une approche exclusivement militaire dans ce pays ou au Darfour, par exemple, ne saurait suffire.
L'acheminement de l'aide humanitaire, la reconstruction d'un pays ou d'une région ne peuvent se faire que dans un environnement sécurisé. Mais est-ce le rôle de l'Alliance, est-ce le rôle d'une alliance militaire de fournir cette aide ? Je le crois d'autant moins que nous disposons d'institutions internationales compétentes pour ce faire. Les missions de reconstruction doivent impérativement relever d'organisations qui en ont la compétence, en particulier l'ONU ou l'Union européenne. L'OTAN doit disposer de moyens pour accomplir ses tâches actuelles qui sont des missions militaires.
Elle n'a pas les moyens humains et financiers pour rebâtir des systèmes politiques ou socio-économiques.
Nos recommandations omettent de mentionner la question de l'Afghanistan. Or, les chefs d'État et de gouvernement saisiront l'occasion de cette rencontre de Riga, le 28 novembre, pour faire le point sur la situation difficile dans ce pays. La crédibilité de l'Organisation est engagée dans cette mission. Riga doit donc permettre de donner les impulsions nécessaires pour que nous réussissions ensemble à remettre définitivement ce pays sur la bonne voie. Je m'inscris pleinement dans les propos du secrétaire général de l'OTAN lorsqu'il dit : « L'OTAN n'a pas pour mission de régler les problèmes de l'Afghanistan parce que la réponse n'est pas militaire. Le vrai problème est que l'Afghanistan n'est pas suffisamment sur l'écran radar de l'Union européenne. Il est important que l'Union européenne, les Nations unies, la Banque mondiale se rendent compte qu'il s'agit d'une opération conjointe. »
À côté de cette première extension de type fonctionnel, l'extension géographique de l'Alliance, à travers son élargissement et le développement de partenariats avec de nouveaux pays, suscite bien des interrogations, comme nous l'avons vu et entendu au cours de nos discussions. Certes, il convient de reconnaître la contribution apportée par des pays non membres de l'Alliance à des opérations militaires de celle-ci. Il peut sembler opportun d'améliorer les modalités pratiques de leur association aux opérations militaires mais sans pour autant changer la nature profonde de l'OTAN qui doit, à mes yeux, demeurer une alliance militaire euro-atlantique.
L'élargissement de l'Alliance doit rester dans le cadre de l'article 10 du Traité et ne doit pas être contourné par l'ajout de nouveaux partenariats qui viendraient concurrencer ceux qui existent déjà. Il doit aussi rester dans le cadre de l'article 5 du Traité, comme l'ont souligné de nombreux intervenants avant moi. Cet article assure une solidarité globale entre les alliés. Lorsque cet ensemble est trop large, cette solidarité risque de se diluer. La garantie américaine d'intervenir pour assurer la sécurité de l'Europe risque de s'effriter. Ne prenons pas ce risque. Nous devons éviter toute action qui puisse remettre en cause la solidité de l'Alliance dans un monde devenu incertain, voire dangereux.
Je conclurai mon intervention en rappelant le besoin pour l'OTAN d'une politique européenne de sécurité et de défense forte. Un partenaire européen fort, un pilier européen au sein de l'OTAN crédible constitue la meilleure garantie de la pérennité du lien transatlantique. Ne tombons pas dans le piège facile qui consiste à souligner les écarts de dépenses militaires ou d'intérêts géopolitiques entre l'Europe et les États-Unis. Les Européens ont des préoccupations et des méthodes de résolution des conflits différentes de celles de Washington. Néanmoins, le lien entre l'Europe de la défense et l'OTAN doit se bâtir sur la complémentarité et surtout sur le dialogue constant.
Nous, Européens, parviendrons à jouer un rôle important au sein de l'OTAN et à y faire triompher nos options et nos points de vue si nous sommes crédibles et si nos moyens militaires sont opérationnels. Le travail sur ce dernier point doit être poursuivi avec plus de volonté politique et des moyens budgétaires complémentaires. Je partage pleinement l'opinion de la ministre française de la Défense, Mme Alliot-Marie, lorsqu'elle affirme : « L'accroissement des capacités européennes est nécessaire au renforcement du pilier européen de l'Alliance, condition elle-même indispensable à un partenariat équilibré entre les États-Unis et l'Europe et une répartition équitable des responsabilités en matière de sécurité ».
Un grand défi nous attend dans les Balkans occidentaux où l'Union européenne s'est engagée à accompagner le cheminement du Kosovo vers son statut final. Elle doit se préparer à une relève de l'OTAN sur le modèle de ce qui a été entrepris en Bosnie. La commission des Relations extérieures se rendra, je l'espère, prochainement sur place pour mieux apprécier les réalités de cette situation complexe. Les Européens ont l'occasion d'assumer pleinement, en liaison avec l'Alliance atlantique, leur tâche de sécurité sur leur continent. Voilà en fin de compte l'objectif que nous ne devons pas perdre de vue dans l'évolution de l'Alliance pour les années qui viennent.
Mme la présidente. - Je vous remercie, monsieur Roelants du Vivier, et je souligne l'excellent travail de votre commission. Il était en effet très important d'être prêts avant le sommet de manière à pouvoir y jouer un rôle.
M. Josy Dubié (ECOLO). - Je m'associe aux félicitations que la présidente a adressées au président de la commission des Relations extérieures. En effet, l'initiative d'organiser un débat en commission sur le sujet très important de l'éventuelle réforme de l'OTAN, en particulier les propositions qui vont être formulées à Riga, me semblait extrêmement importante.
Je voudrais profiter de cette opportunité pour préciser la position de mon parti concernant l'OTAN et l'évolution future de cette organisation internationale.
Avec la chute du mur de Berlin, il y a tout juste dix-sept ans, et la décomposition du bloc de l'Est et ensuite de l'URSS, beaucoup espéraient toucher ce qu'il était alors convenu d'appeler les dividendes de la paix. En effet la menace du bloc dominé par l'URSS qui avait justifié, pour y faire face, la signature du pacte de l'Atlantique Nord le 4 avril 1949 et donc la création de l'OTAN, cette menace devenait sans objet.
On pouvait donc espérer que les sommes colossales dépensées tant à l'Est qu'à l'Ouest, pendant plus de 40 ans, dans la course aux armements allaient pouvoir être enfin utilisées pour s'attaquer aux dramatiques problèmes du sous-développement et son cortège tragique de misère et de famine qui ravageaient encore notre planète.
Malheureusement, dix-sept ans plus tard, nous en sommes revenus au même montant et même a un montant de dépenses militaires - plus de mille milliards de dollars annuellement - supérieur à ce celui de la fin de la guerre froide.
Logiquement l'OTAN, organisation de défense mutuelle, aurait dû disparaître, comme le Pacte de Varsovie, puisque la menace qui l'avait justifiée n'existait plus. Or, non seulement l'OTAN existe toujours, mais ce que certains comptent nous proposer à Riga les 28 et 29 novembre vise à augmenter ses missions et même à transformer à profondément la nature même de l'Alliance, qui passerait d'une organisation défensive commune en cas d'attaque, comme le prévoit explicitement l'article 5 du traité, à une alliance offensive visant à intervenir éventuellement préventivement en cas de menaces qui restent à définir.
Cette évolution, qui est contraire à la lettre et à l'esprit de l'article 5, est pour nous totalement inacceptable, comme l'est aussi l'élargissement de l'alliance à des pays non européens comme le Japon, la Corée du Sud, l'Australie et la Nouvelle Zélande.
Rappelons qu'un tel élargissement vers une alliance militaire mondiale, dotée d'armement nucléaire, est totalement contraire à la lettre de l'article 10 du traité qui précise que l'accession d'un autre État européen - je dis bien européen - ne peut se faire que par l'accord unanime des pays membres, ce qui signifie donc bel et bien qu'un seul pays, en l'occurrence la Belgique, pourrait s'y opposer.
Comme M. Roelants du Vivier, président de la commission, je déplore l'absence des ministres des Affaires étrangères et de la Défense. Finalement, c'est bien eux qui nous représenteront à Riga. J'aurais souhaité les interroger sur la position du gouvernement à l'égard de ces projets d'élargissement de l'alliance au-delà des frontières européennes.
Pour être clair, il n'est pas question pour nous de transformer l'OTAN en bras armé de l'impérialisme américain et des visions bellicistes de son président ni de son nouvel ordre mondial qui vient d'ailleurs d'être massivement désavoué par le peuple américain.
Pour nous, si l'OTAN doit continuer à exister, c'est dans le cadre du traité existant. Autrement dit : le traité, mais tout le traité et rien que le traité.
Quand je dis tout le traité, je tiens à souligner l'importance de l'article 1er qui stipule que « les parties s'engagent à s'abstenir dans leur relations internationales de recourir à la menace ou à l'emploi de la force de toute manière incompatible avec les buts des Nations unies. »
Le traité s'oppose aussi, dans son article 4, à l'unilatéralisme qui a caractérisé la politique de l'administration Bush, notamment en matière de relations internationales et de recours à la force. L'article 4 stipule « Les parties se consulteront chaque fois que, de l'avis de l'une d'elles, l'intégrité territoriale, l'indépendance politique ou la sécurité de l'une des parties sera menacée ». On ne peut pas dire que cet article 4 ait été particulièrement appliqué par M. Bush et son administration au cours des dernières années.
Pour nous, il est clair que les problèmes de maintien de la paix et la sécurité collective sont d'abord de la compétence du Conseil de sécurité des Nations unies. Cette approche est d'ailleurs clairement précisée par l'article 7 du traité : « Le présent traité n'affecte pas et ne sera pas interprété comme affectant en aucune façon les droits et obligations découlant de la Charte pour les parties qui sont membres des Nations unies ou la responsabilité primordiale du Conseil de sécurité dans le maintien de la paix et de la sécurité internationales ».
Nous ne pouvons pas accepter non plus la proposition qui est sur la table à Riga visant à un financement commun des opérations de l'OTAN et à l'extension du financement commun pour l'achat de nouveau matériel militaire pour l'OTAN.
Cette proposition vise clairement à transférer vers l'Europe une partie de la facture américaine en matière de défense, facture qui explose et atteint des sommes astronomiques avec les opérations en cours en Irak et en Afghanistan.
La lutte contre le terrorisme ne se fait pas par l'achat massif et coûteux de nouveaux matériels militaires, mais par l'investissement massif, et donc coûteux lui aussi, dans la réduction des causes qui nourrissent le terreau où se recrutent les terroristes. Il faut éviter l'accroissement de la fracture sociale internationale et les conflits non résolus, le premier d'entre eux étant le conflit israélo-arabe.
La relance d'une course aux armements ne doit pas priver le monde des ressources financières indispensables pour atteindre les objectifs du millénaire, dont la réalisation serait beaucoup plus porteuse en matière de sécurité internationale que l'achat de nouveaux chars ou d'avions de combat.
Le système actuel, dans lequel les décisions sont prises par consensus, donne pratiquement un droit de veto à chaque pays membre de l'Alliance, ce qui permet de s'opposer à l'aventurisme de l'hyperpuissance des États-Unis.
Il n'est ainsi pas inutile de se rappeler que l'opposition du gouvernement arc-en-ciel - dont nous faisions partie - à l'invasion de l'Irak par le nord à travers la Turquie a concrètement empêché que cette invasion ait lieu.
Les propositions sur la table à Riga visant à introduire « l'abstention constructive » ou les décisions à la majorité doivent être rejetées et nous souhaiterions savoir quelle est la position du gouvernement à ce sujet, ainsi que sur le financement commun des opérations de l'OTAN et l'achat de matériel militaire.
Enfin, nous souhaitons que soit abordé à Riga le problème de la relance du processus de désarmement nucléaire de l'OTAN. Quelle est la position du gouvernement sur cette grave question au moment où l'on assiste à une forme de relance de la course à l'atome militaire avec l'entrée dans ce dangereux club de la Corée du Nord et peut-être, demain, de l'Iran ?
En conclusion, nous ne souhaitons pas que soit modifié le concept stratégique qui est à la base même de la création de l'OTAN, qu'il passe d'une notion défensive à une notion offensive.
Autrement dit un bouclier oui, une épée certainement non !
En résumé, nous souhaiterions connaître de manière précise la position que le gouvernement défendra à Riga sur les points suivants.
Je parle toutefois ici dans le vide puisqu'aucun représentant du ministre n'est présent ce matin. J'introduirai dès lors une question parlementaire précise la semaine prochaine pour obtenir une réponse aux points que je vais citer.
Le gouvernement belge souhaite-t-il une modification du Traité de l'Atlantique nord signé le 4 décembre 1949 à Washington et si oui, de quels articles et dans quel sens ?
En particulier, le gouvernement est-il favorable à l'extension du traité à des pays non européens ?
Le gouvernement est-il favorable à un financement commun des opérations de l'OTAN et à l'extension du financement commun pour l'achat de nouveau matériel militaire ?
Le gouvernement réaffirme-t-il son attachement au principe stratégique d'une Alliance uniquement défensive dans le respect des prérogatives du Conseil de sécurité des Nations unies ?
Le gouvernement reste-t-il attaché au principe de la décision par consensus ou est-il prêt à l'abandonner ? Si oui, au profit de quoi ?
Que compte faire le gouvernement pour s'opposer à toute nouvelle course aux armements, en particulier nucléaires, et est-il favorable à une dénucléarisation de l'OTAN ?
Mevrouw Annemie Van de Casteele (VLD). - Ook ik wil de drie verslaggevers feliciteren en de sprekers danken die ons met hun uiteenzetting op dit debat hebben voorbereid. Zelf ben ik altijd een pacifist geweest die droomde van een wereld waarin wapens overbodig zijn. Vandaag ben ik ietwat realistischer geworden. Bovendien sta ik hier vandaag om het standpunt te vertolken van mijn partij, de VLD, die een verantwoordelijke partij is en die de minister van Buitenlandse Zaken levert. Overigens wijs ik collega Dubié erop dat minister De Gucht zijn mening over de hervorming van de NAVO al kenbaar heeft gemaakt in de gemeenschappelijke commissie van Kamer en Senaat en nu wacht op onze aanbevelingen om vooruit te gaan.
Heel wat sprekers hebben erop gewezen dat sinds de oprichting van de NAVO de wereld erg is veranderd. Denk maar aan de val van het IJzeren Gordijn, de conflicten die van een ander type zijn geworden in Europa, 11 september, de terroristische dreiging, de nucleaire dreiging. De bedreigingen van onze veiligheid zijn gewijzigd. De manier waarop wij ons daartegen moeten beschermen moet die evolutie volgen.
De NAVO staat dus aan de vooravond van belangrijke beslissingen. Het bondgenootschap moet zich aanpassen aan de hedendaagse uitdagingen en noden.
In Afghanistan zijn vandaag NAVO-eenheden gelegerd aan de grens met de Volksrepubliek China. Sinds 2001 levert België daar een substantiële bijdrage aan de eenheden van de International Stabilisation Force.
De toekomst van de alliantie staat of valt misschien niet met het welslagen van die operatie in Afghanistan, maar is er wel in grote mate afhankelijk van. Er staat niets minder op het spel dan duurzame vrede voor alle inwoners van de Hindoe Koesj. Op dit ogenblik heeft de NAVO af te rekenen met opflakkerend geweld van talibanstrijders die zich in het zuiden proberen te reorganiseren. Om zulke uitdagingen te kunnen aangaan heeft de NAVO behoefte aan adequate structuren, voldoende militair personeel, een moderne uitrusting en toereikende financiële middelen.
Het koudeoorlogsdenken biedt hiervoor niet langer de recepten en oplossingen. Vandaar onze aanbevelingen voor een aangepaste NAVO. We zijn daarbij niet over één nacht ijs gegaan. We hebben talloze gezagsdragers, experts en getuigen gehoord, ook vredesactivisten. Zo kwam een resolutie tot stand waarvan de VLD de grote lijnen steunt nadat we met wisselend succes geprobeerd hebben bepaalde nuances aan te brengen. Ik betreur dat het voorstel van aanbevelingen ons zo laat werd overgemaakt zodat het moeilijk was de tekst nog echt te amenderen.
Voor de VLD moet een gemeenschappelijk buitenlands en veiligheidsbeleid van de Europese Unie hand in hand gaan met de versterking van de NAVO. Beide organisaties zijn in onze ogen complementair. Door een versterking van de Europese pijler zal de NAVO zelf ook sterker worden. Dat heeft ook minister De Gucht in zijn inleidende toespraak gesteld.
In haar opeenvolgende regeerverklaringen heeft de regering benadrukt dat ze een gelijkwaardige Europese pijler in de NAVO nastreeft. Mede dankzij de VLD werd die doelstelling in de resolutie opgenomen.
Voor de VLD blijft de NAVO de hoeksteen van onze veiligheid, weliswaar onder VN-mandaat. Parallel moet de EU-defensie verder worden ontwikkeld. De aan de gang zijnde EU-operaties in Congo en Bosnië bewijzen dat de EU reeds een aanzienlijk gedeelte van de weg naar een geloofwaardige defensiemacht heeft ontwikkeld. Het parcours is nog lang niet volledig afgelegd, maar er zijn belangrijke mijlpalen gezet.
Enkele elementen uit de uiteenzetting van ambassadeur Struye de Swielande zijn ons bijgebleven wegens hun beknoptheid en diepgang. `Transformatie', `globaal' en `oorlog tegen terrorisme': deze begrippen moeten op de Top van Riga een ondubbelzinnige en eenduidige invulling krijgen en gepaard gaan met de nodige signalen naar partners en landen in de periferie van het bondgenootschap en naar de buitenwereld.
Daarnaast moeten er in Riga ook antwoorden komen met betrekking tot de volgende doelstellingen: de herbevestiging van de NAVO als centrale plaats voor veiligheidskwesties, de voortzetting van de uitbreiding van de NAVO en de partnerschappen, hoe ervoor zorgen dat de NAVO-operaties succesvol zijn, welke aanpassing is er nodig van de militaire capaciteit. Aan die doelstellingen zijn vragen gekoppeld: wat is het veiligheidsbewustzijn, wat wordt hieraan besteed, welke multilaterale, bilaterale en nationale instrumenten worden er hiervoor ingezet, hoe kunnen we dat maximaal coördineren en hoe kunnen we een optimale samenwerking bekomen hoe versterken wij de democratische controle? Welke civiele instrumenten inzake crisisbeheersing, die verder gaan dan collectieve defensie volgens artikel 5, passen hierin? Hoe kunnen we aan preventie doen? Hoe en in welke mate is de NAVO bevoegd inzake wederopbouw, humanitaire en vredesoperaties? Hoe kunnen we partnerschappen ontwikkelen en verdiepen op een pragmatische, stapsgewijze en flexibele manier?
De resolutie reikt hiervoor richtinggevende elementen aan. De antwoorden dienen op het niveau van de staats- en regeringsleiders en de regeringen van alle NAVO-lidstaten te worden gegeven.
Ik heb één bedenking, namelijk over punt 17 in verband met het budget. Volgens de VLD is de tekst te rigide. Ik wil minister De Gucht citeren: `De kwestie van de uitbouw van een eigen capaciteit stelt tevens de vraag naar de daarvoor beschikbare budgetten en naar een nieuwe regeling van common funding. Dit is een prioriteit in het dossier van de militaire transformatie en zal prominent op de NAVO-top van Riga staan. De uitbreiding van de gemeenschappelijke financiering in het raam van de militaire transformatie moet volgens af te spreken spelregels gebeuren binnen een globaal concept en niet cas par cas. De huidige praktijk om afhankelijk van de omstandigheden af te wijken van de bestaande regels moet vermeden worden en er moet een nieuw evenwicht komen met het cost lie where they fall-principe voor niet-artikel 5-operaties.' Die passage uit de uiteenzetting van minister De Gucht is blijkbaar niet goed begrepen. De formulering van aanbeveling 17 beknot eigenlijk die mogelijkheid.
De VLD en de commissie voor de Buitenlandse Betrekkingen zullen de verdere evolutie blijven opvolgen. Riga is geen eindpunt. Verdere stappen van aanpassing aan de nieuwe omgeving zullen steeds nodig blijven, want wij blijven hopen op een wereld zonder geweld, zonder wapens, een wereld waarin vrede en welvaart voor iedereen mogelijk is, een wereld met respect voor mensenrechten, fundamentele vrijheden en democratie.
De voorzitter. - Mevrouw Van de Casteele wees erop dat de heer De Gucht aan het debat heeft deelgenomen. De minister van Landsverdediging is momenteel in Chili, maar zijn kabinetschef, de heer Regibeau, heeft onze werkzaamheden gevolgd, waarvoor ik hem wil bedanken.
-De bespreking is gesloten.
-De stemming over de aanbevelingen van de commissie voor de Buitenlandse Betrekkingen en voor de Landsverdediging heeft later plaats.
De voorzitter. - We zetten onze werkzaamheden voort vanmiddag om 15.00 uur.
(De vergadering wordt gesloten om 11.50 uur.)