2-230

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 10 OKTOBER 2002 - OCHTENDVERGADERING

(Vervolg)

Vraag om uitleg van de heer Philippe Monfils aan de minister van Economie en Wetenschappelijk Onderzoek, belast met het Grootstedenbeleid, over «de door de verzekeringssector aangevraagde premieverhogingen burgerlijke aansprakelijkheid auto's» (nr. 2-864)

M. Philippe Monfils (MR). - Une grande partie de l'opinion publique, à savoir essentiellement tout qui conduit un véhicule automobile en Belgique, s'émeut des demandes introduites par le secteur des assurances en vue d'obtenir une augmentation du montant des primes de responsabilité civile automobile. On parle, dans les médias, d'une demande d'augmentation de 15% au moins.

Or, déjà actuellement - et le ministre le sait puisqu'il a bien voulu travailler, de manière extrêmement efficace d'ailleurs, à la modification de la loi sur les assurances - l'on assiste chez les assureurs à un vaste mouvement de « nettoyage » des polices d'assurances en vue de ne conserver en portefeuille que les seuls conducteurs considérés comme étant de « bons risques ». Des primes excessives basées sur l'âge ou le sexe de l'assuré, bien plus que sur son passé d'automobiliste, sont actuellement tarifées. Des exclusions, sous forme de résiliation de polices, sont prononcées à l'encontre d'assurés considérés comme conducteurs à risques simplement parce qu'ils ont eu la malchance d'être impliqués dans plusieurs sinistres même en étant dans leur droit. En réalité, le système actuariel défendu par les compagnies d'assurances aboutit à l'exclusion de personnes qui ont simplement eu la malchance de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment.

La conséquence prévisible de cette politique du milieu des assurances saute aux yeux : les 100.000 conducteurs actuellement recensés comme étant non assurés risquent de voir grossir leurs rangs de manière subséquente alors que nous venons tout récemment de faire adopter par l'ensemble du parlement une nouvelle législation dont le but était précisément d'enrayer ce phénomène de la non-assurance.

Des négociations ou des pourparlers seraient actuellement en cours entre le secteur de l'assurance et le cabinet du ministre. C'est la raison pour laquelle je souhaiterais obtenir des précisions. Dans la presse, certains ont écrit que le ministre aurait marqué son accord sur le principe de l'augmentation sollicitée, « à condition toutefois qu'il ne s'agisse pas de 15% ni même de 10% ». Dès lors, j'aimerais connaître le niveau d'augmentation qu'il estimerait justifié.

On parle également de la mise sur pied d'un système d'objectivation des critères de hausse qui serait lié à l'évolution sectorielle, notamment quant au prix des voitures neuves, de la main-d'oeuvre en carrosserie, des pièces de rechange, etc. Qu'en est-il exactement ? Le ministre ne craint-il pas que semblable objectivation réclamée par le secteur professionnel supprime tout pouvoir d'appréciation dans son chef en créant en quelque sorte des conditions automatiques d'augmentations systématiques ?

Enfin, l'une des justifications de la demande de hausse introduite par les assureurs est - ils le répètent à l'envi - la mauvaise évolution boursière qui aurait largement écorné les résultats des placements effectués par les compagnies. Bref, celles-ci invoquent, si pas leur mauvaise gestion, en tout cas leur imprudence ou leur flair médiocre en matière de placements pour faire payer par les assurés les conséquences négatives qui en résultent. Il est évident que certains ont joué en bourse et qu'ils se sont trouvés quelque peu démunis quand la bulle spéculative a explosé, mais est-ce une raison pour présenter la note aux assurés ? En ce qui me concerne, je trouve cette attitude assez étonnante.

Existe-t-il actuellement un règlement ou un contrôle spécifique sur les placements boursiers des compagnies d'assurances ? À défaut, le ministre envisage-t-il une quelconque initiative en la matière ?

Je voudrais, avant de conclure, aborder un dernier point que je n'avais pas mentionné dans ma note initiale mais à propos duquel je suis persuadé que le ministre pourra me fournir des éclaircissements. J'ai lu que certaines organisations ne voulaient pas participer aux travaux du Bureau de tarification pour des raisons qui leurs sont propres. J'ai beaucoup travaillé à l'élaboration de la loi et je ne comprendrais pas que ce Bureau soit retardé parce que tel ou tel ne veut pas y entrer pour telle ou telle raison.

Le mieux est que tout le monde soit présent et que la jurisprudence à élaborer par le bureau de tarification progresse. C'est indispensable, car les quelques évolutions perceptibles actuellement ne semblent pas aller dans le bon sens et reviennent à rejeter dans une sorte de clandestinité les conducteurs qui ne payeront plus leur assurance en raison des tarifs exorbitants. Il est donc grand temps que ce bureau fonctionne avec ou sans certaines organisations. J'estime que l'on ne peut pas bloquer l'évolution d'une loi manifestement bien conçue. J'espère, monsieur le ministre, que vos réponses nous permettront de voir plus clair dans cette problématique qui intéresse évidemment de nombreux Belges.

(Voorzitter: mevrouw Sabine de Bethune, eerste ondervoorzitter.)

M. René Thissen (CDH). - Nous avons déjà discuté de cette problématique voici quelques mois. J'avais souligné que certains problèmes importants ne seraient pas réglés par la loi que nous allions voter et qu'ils ne manqueraient pas de se poser ultérieurement. C'est déjà le cas aujourd'hui. J'avais annoncé mon intention de déposer une proposition de loi visant à rectifier certains éléments et ce sera donc chose faite dans les jours qui viennent.

Je rejoins pleinement M. Monfils dans son argumentation relative aux augmentations demandées par les compagnies d'assurances. Je ne puis évidemment accepter que l'on justifie cette demande d'augmentations, notamment par des placements boursiers décevants. Tout bon père de famille sait qu'il ne doit pas mettre tous ses oeufs dans le même panier. Alors que dire des compagnies d'assurances auxquelles il incombe particulièrement de pratiquer une répartition prudentielle ! Si ces compagnies ont vendu des biens immobiliers pour participer à la bulle boursière, les consommateurs n'ont pas à subir les conséquences de ces imprudences.

Qu'en est-il exactement ? On a parlé d'une demande d'augmentation de 15%. Si l'on devait l'appliquer à un pensionné qui paye actuellement 900 euros de prime d'assurance, cette dépense serait augmentée de 135 euros. À titre comparatif, ces 15% représenteraient la moitié de l'augmentation prévue pour les pensions des petits indépendants envisagée par M. Verhofstadt dans sa déclaration gouvernementale.

L'impact est sérieux, à moins de considérer que la pension des indépendants puisse être augmentée davantage, ce que je soutiendrais le cas échéant, bien entendu.

Pour ce qui est de la sectorisation, il est évident que le système en vigueur fait que certaines catégories de personnes sont tout à fait désavantagées. Comme M. Monfils, je constate que certaines personnes se voient appliquer des augmentations tarifaires considérables, alors qu'elles ne portent pas la moindre responsabilité dans les accidents auxquels elles se trouvent mêlées, quand elles ne sont pas purement et simplement éjectées par leur compagnie d'assurances !

Il faut absolument revenir à un système plus équitable. Les jeunes doivent être assurés et les tarifs doivent rester abordables. Un des motifs essentiels de la non-assurance est que la charge de l'assurance est trop importante, dans le cadre d'un budget normal, ce qui amène certains conducteurs à prendre le risque inconsidéré de rouler sans assurance. En outre, l'augmentation généralisée des primes pose un problème très important car elle va augmenter le nombre des non-assurés, avec les conséquences que cela implique.

M. Charles Picqué, ministre de l'Économie et de la Recherche scientifique, chargé de la Politique des grandes villes. - J'ai déjà eu l'occasion de dire publiquement que certaines demandes de modification des primes étaient évidemment inacceptables.

Je tiens à rappeler ici le déroulement du processus de contrôle des primes, dont vous connaissez probablement certains d'éléments. En matière de hausse de prix, il faut être conscient du fait qu'une entreprise n'est pas l'autre. De manière générale, nous sommes dans une société qui vante les mérites de la concurrence mais il arrive que cette concurrence, que l'on a voulu, ne soit pas bénéfique aux consommateurs.

Il existe d'ailleurs des paradoxes dans l'analyse que nous pouvons faire du problème des assurances, les entreprises étant différenciées. Plusieurs éléments distinguent les entreprises et m'incitent à prendre à prendre en compte certaines demandes et pas d'autres.

Quels éléments faut-il prendre en considération lorsqu'on examine la situation d'une entreprise d'assurances ? D'abord, vérifier à quel moment on a autorisé la dernière augmentation, d'autant que certaines compagnies finiraient pas demander une augmentation tous les trois mois ; ensuite, contrôler les tarifs pratiqués par rapport à ceux de la concurrence, afin d'introduire une notion comparative, et vérifier la composition du portefeuille, mais je reviendrai sur ce point ; enfin, examiner la situation financière globale de l'entreprise.

Le problème est qu'il n'y a plus de tarif de référence en ce qui concerne les prix aux consommateurs. Il n'est donc pas possible de déterminer une hausse de prix raisonnable pour l'ensemble du marché. C'est tout le débat sur la tarification. Plusieurs entreprises ont obtenu des hausses de l'ordre de 5%, fin 2001 et au début de cette année. Il me semble que ces entreprises pourront difficilement justifier une nouvelle demande cette année, surtout d'une ampleur de 10%, voire davantage.

D'autres entreprises n'ont pas introduit de demande depuis plusieurs années. Pour celles-là, une hausse, comparable à celle qui a été accordée à d'autres, est concevable. Ce ne serait que justice puisqu'il faut traiter toutes les entreprises de manière objective. En tout cas, chaque dossier doit faire l'objet d'un examen particulier.

Le problème de l'assurance automobile se pose de manière assez criante. Cependant, tout ce débat que nous menons actuellement sur l'assurance automobile concerne aussi d'autres formes d'assurances comme les polices relatives aux accidents du travail, aux incendies, etc. On parle beaucoup pour le moment de l'exclusion automobile mais d'autres formes d'exclusion sont possibles. Je ne m'attarderai toutefois pas aujourd'hui sur cette question.

Actuellement, mes services étudient la mise au point d'un indice qui serait spécifique à l'assurance automobile. Cet indice devrait mesurer de manière objective l'évolution du coût des sinistres, d'année en année.

Les assureurs avancent l'argument que je ne me montre pas très généreux, me reprochent de refuser des hausses ou d'en renvoyer l'examen, et ils insistent pour que je tienne compte du coût des réparations et de la valeur des voitures. Il y a, en effet, un certain nombre d'indices qui, objectivement, peuvent peser sur les assurances.

J'ai été frappé par le niveau élevé des coûts des réparations exigés par les garagistes. Cette question m'interpelle fortement. Est-ce dû à la complexité technologique de l'automobile ? Je l'ignore mais, si cela continue, personnellement, je préférerai une voiture dépourvue de tous ces instruments électroniques auxquels je ne comprends d'ailleurs souvent rien et faisant l'objet de coûts de réparation très élevés...

M. Philippe Monfils (MR). - ... dont beaucoup ne servent pas à grand chose, et je parle en orfèvre.

M. Charles Picqué, ministre de l'Économie et de la Recherche scientifique, chargé de la Politique des grandes villes. - Je suis d'accord avec vous. Non seulement ils ne servent pas à grand chose, mais en outre je n'arrive pas à les utiliser avec efficacité.

Si cet indice devait être créé, il constituerait un outil d'analyse qui nous permettrait de faciliter le traitement des dossiers de hausses de prix. Je voudrais éviter, chaque fois qu'une hausse est demandée, les répétitions de discussions à propos de facteurs exogènes, comme ceux que je viens de citer.

L'indice pourrait constituer une aide, mais il ne tiendrait pas compte de la situation financière de l'entreprise d'assurances, de la structure de son portefeuille, etc. À ce stade, il s'agirait plutôt d'un indice technique.

Chaque dossier devrait mériter un examen individuel. Nous en arrivons ainsi à l'étude d'autres paramètres pouvant expliquer la situation des compagnies d'assurances. Il y a, certes, des coûts objectifs, mais aussi l'évolution boursière, que vous avez tous deux évoquée. Je reconnais que la chute des marchés boursiers influence de façon négative la rentabilité des entreprises d'assurances, comme beaucoup d'autres entreprises, mais je tiens à rappeler qu'il existe des règles en matière de placements. Celles-ci sont contenues dans un arrêté de 1991, assez long et très complexe, dont je vous épargnerai aujourd'hui la lecture mais dont vous pouvez obtenir un exemplaire si vous le souhaitez.

Cet arrêté, qui constitue la transposition des règles européennes, impose notamment une dispersion des placements. L'article 10 de cet arrêté évoque les valeurs représentatives des provisions et dettes techniques.

Ces valeurs représentatives doivent appartenir à des catégories de placements qui sont les suivantes : des obligations, des actions, des parts dans des organismes de placement collectif en valeurs mobilières, en liquidités et en biens immobiliers, des prêts offrant des garanties suffisantes, des immeubles et droits réels immobiliers, la part des réassureurs dans les provisions techniques selon des conditions acceptées par l'Office de contrôle des assurances.

L'article 10 précise également que les valeurs représentatives doivent être localisées. Elles doivent se situer dans la communauté pour les entreprises de droit belge. Les valeurs représentatives mobilières localisées en dehors de la communauté sont également admises, mais à la condition que la Banque nationale, un établissement de crédit, la Commission financière et bancaire, etc., agréent ces institutions de crédit et ces placements.

Les valeurs représentatives ne peuvent pas excéder certaines proportions par produit, soit pas plus de 10% pour les obligations, pas plus de 10% pour les placements en actions ou titres assimilables à celles-ci, avec des petites dérogations sur lesquelles je ne m'étendrai pas, pas plus de 5% pour les certificats immobiliers d'une même émission - il suffit d'une mauvaise opération sur un certificat immobilier pour qu'une catastrophe se produise -, pas plus de 10% pour les placements dans un ou plusieurs immeubles suffisamment proches pour être considérés collectivement comme un seul investissement. Il s'agit en effet d'éviter la précarité que pourrait produire une opération immobilière unique dans le portefeuille des compagnies d'assurances. Je répète que l'Office de contrôle des assurances peut s'opposer au placement ou au maintien de ces placements s'il a des raisons de croire qu'ils ne représentent pas des garanties suffisantes pour répondre aux exigences de sécurité, de rendement, de liquidité que doivent offrir les compagnies d'assurances.

Grâce au contrôle de l'OCA organisé par l'arrêté de 1991, il existe donc des dispositions qui encadrent les politiques de placement des compagnies d'assurances. Cependant - puisque tous deux vous avez parlé de la crise boursière - il est évident que si un organe public devait commencer à juger de l'opportunité d'un placement boursier, alors, je dirais avec une certaine perfidie qu'il vaudrait mieux nationaliser le secteur des assurances et en revenir ainsi à un débat vieux de vingt-cinq ans. Bref, un minimum d'encadrement est donc garanti par l'OCA.

On peut suggérer qu'une réglementation, notamment en matière de définition d'indices, soit mise en oeuvre pour éviter que les consommateurs ne payent les erreurs de gestion des compagnies d'assurances. Mais le jeu de la concurrence et de la libéralisation que nous avons dû jouer s'impose ici.

Il est assez difficile d'imaginer une macro-réglementation parce que les règles en cette matière sont souvent dictées par des directives européennes, qui organisent de plus en plus la libéralisation. Pour ma part, vous le savez, j'ai quelques doutes sur les dérives qu'engendrent ces directives européennes qui, au nom de la compétitivité, de la libéralisation, de la concurrence, créent des conditions qui ne sont pas celles que l'on attendait. En effet, il me semble avoir entendu dire que la concurrence serait bénéfique pour le consommateur. N'avons-nous pas entendu très souvent que la libéralisation de l'économie amènerait des bienfaits incontestables pour le consommateurs ?

Il est clair que nous devons être prudents. D'ailleurs, durant les travaux préparatoires à la directives sur les fonds de pension notamment, la Belgique avait plaidé pour l'introduction de règles plus strictes que le simple recours au principe de la « personne prudente », mais nous nous sommes retrouvés seuls face aux quatorze autres États membres. Les événements prouvent que nous devrions rester prudents et que certains instruments devraient rester aux mains des pouvoirs publics.

Il faut bien sûr comprendre les problèmes que connaissent les compagnies d'assurances qui doivent supporter des coûts en amont mais nous ne pouvons pas nous ingérer davantage dans leur politique de placement à moins de remettre en question tout le système fondé sur la libéralisation.

Il faut aussi savoir que l'on ne peut pas gagner sur tous les tableaux. En effet, nous entrons ici dans un débat où nous sommes déchirés entre, d'une part, notre intérêt à ne payer que des primes les plus basses possibles et, d'autre part, notre exigence d'une couverture par l'assurance du plus grand nombre de personnes possible. Ce n'est pas simple. Je pourrais effectivement dès demain conclure un accord avec les compagnies d'assurances en leur donnant mon accord pour la segmentation, nous verrons alors nos primes diminuer, ou ne pas augmenter. Mais les assureurs auront écrémé le risque et, de manière injuste, exclu de nombreuses personnes de l'accès à l'assurance. Nous sommes donc déchirés entre le confort du bon conducteur qui, refusant la solidarité avec les autres conducteurs, préfère payer des primes très basses et la volonté d'étendre l'assiette de couverture à tout le monde. Les bons conducteurs paieront alors aussi pour les mauvais.

À cet égard, nous sommes déchirés. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu trouver une voie originale. Vous la connaissez puisque vous avez participé aux travaux, notamment en matière d'assurance automobile ; je veux parler du bureau de tarification. Le débat sur le bureau de tarification a été entamé à la suite d'une initiative que vous aviez prise pour lutter contre la non-assurance. Nous avons pris conscience du fait que si nous ne parvenions pas à contrôler les primes, nous allions accélérer le phénomène et nous ne pourrions pas jouer exclusivement sur la répression.

Je dis d'emblée que je suis de ceux qui souhaitent une grande sévérité à l'égard des gens non assurés. Cependant, si nous voulons éviter qu'ils soient trop nombreux, nous devons leur permettre d'aboutir dans leurs négociations avec les assureurs de manière à pouvoir se faire couvrir.

J'en viens à votre question précise, M. Monfils, sur la mise en place du bureau de tarification. J'ai été très surpris par le refus d'une certaine association de consommateurs de participer au bureau de tarification. Elle considère que, malgré ce dernier, les exclus continueront à être nombreux. Or, le bureau de tarification représente quand même une amélioration puisque le bon conducteur paie actuellement pour le mauvais. C'est lui qui alimente le fonds de garantie qui vise à indemniser les victimes des non-assurés. J'ai donc répondu à cette association qu'il valait mieux ne pas faire de démagogie car il serait très facile pour moi de dire qu'en maintenant son refus, elle s'opposait en fait à une participation financière - minimum peut-être - des personnes qui, aujourd'hui, ne sont pas assurées. C'est absurde.

On ne peut avoir le beurre et l'argent du beurre. J'ai donc tenu une réunion avec les gens de l'association en question et je leur ai déconseillé de s'engager dans cette voie car, étant personnellement un bon conducteur, je serais amené à dire qu'en raison de leur position, les gens qui ne s'assurent pas ne le feront toujours pas et ne contribueront donc pas à l'indemnisation de leurs victimes. C'est donc moi qui paierai. Je crois que ce raisonnement est implacable. Les personnes de l'association sont en train d'y réfléchir, monsieur Monfils. Je ne peux préjuger du résultat.

Je ne pense pas qu'il faille changer la loi, j'ai été clair sur ce point. Je puis néanmoins laisser une petite marge de manoeuvre dans les arrêtés d'exécution si cela peut contribuer à dégager un consensus sur la mise en place de ce bureau de tarification. Je considère que ce dernier est une amélioration allant de pair avec le travail répressif ; il concerne ces dizaines de milliers d'automobilistes non assurés, dont nous payons, via le fonds de garantie, les dommages qu'ils causent.

M. Philippe Monfils (MR). - Je remercie le ministre de sa réponse circonstanciée et tout à fait satisfaisante. Sur le fonds de garantie, je partage entièrement votre point de vue, M. le ministre. La politique de la chaise vide ne sert jamais à rien et, si l'on estime que le système doit être amélioré, il vaut mieux en faire partie. C'est une première remarque générale.

Par ailleurs, je connais les raisons du refus des responsables de cette association ; ils se sont d'ailleurs manifestés dans les médias : ils trouvaient que les montants devant être atteints pour une intervention du bureau de tarification étaient trop élevés. Nous savons que la politique est l'art du possible, au Sénat d'abord, mais surtout à la Chambre. Un accord a ainsi été dégagé sur certains montants. Nous verrons plus tard s'il n'y a pas lieu de les revoir. Comme vous le dites, il y a actuellement une amélioration pour les raisons que vous avez expliquées. C'est d'ailleurs le but de ce bureau de tarification.

Comme je vous l'ai dit, je ne comprendrais pas que cette association ne se rende pas compte qu'elle fait fausse route et qu'elle bloque éventuellement le départ du bureau de tarification. On verra, le mouvement se crée en marchant et il est clair que c'est une avancée considérable par rapport au système ancien.

Pour le reste, je ne demande pas que l'on nationalise les compagnies d'assurances, mais je crois qu'il y a dans cette affaire des critères objectifs. Le hausse du coût des réparations est réelle. Maintenant, lorsqu'une ampoule ne fonctionne plus dans le système informatique - je le sais parce que j'ai eu le cas sur une de mes voitures - on demande 40.000 francs, alors qu'il y a cinq ans, on remplaçait l'ampoule pour 3,50 francs. C'est vrai et personne ne peut échapper à cette évolution des technologies. Le reste pose problème. Ce n'est bien sûr pas à vous ou à l'Office de contrôle des assurances de diriger les placements mais, dans l'analyse que vous faites des accords éventuels concernant les hausses, si le critère technique et l'indice que vous allez mettre au point est essentiel, la justification qu'ils ont perdu un peu d'argent parce qu'ils ont un peu trop joué en bourse l'est beaucoup moins. C'est évidemment sur ce point que je voulais attirer votre attention. Il ne faut pas que l'on suive automatiquement les demandes des compagnies pour ce motif-là étant entendu qu'il est indispensable de mettre au point des indices permettant de calculer la manière de fixer les dépenses inéluctables des compagnies d'assurances dues aux accidents.

En ce qui concerne le système de segmentation et autres, il n'est pas question de bons ou de mauvais conducteurs. Le problème, c'est que parfois des bons conducteurs sont considérés comme des mauvais sur le plan statistique, et c'est cela qui énerve la population. Je comprends bien qu'un bon conducteur ne peut pas exiger une prime de 15.000 francs. En effet, un élément de solidarité avec les mauvais conducteurs doit jouer et tout le monde doit pouvoir rouler, sauf retrait du permis par le juge. C'est toujours ma position. Ce ne sont pas les compagnies d'assurances qui doivent dicter la liste de ceux qui roulent et de ceux qui ne roulent pas, c'est le juge. Mais, entre ce principe et le fait d'en arriver à liquider de bons conducteurs, il y a quand même de la marge. C'est bien la raison d'être de ce bureau de tarification : il faut aussi sauver ces personnes qui, n'étant coupables de rien, se trouvent quasiment exclues ou doivent supporter des tarifs qui dépassent l'imagination et qui, en fait, s'analysent comme étant une interdiction de conduire pour bon nombre d'entre eux.

Augmentation d'un côté, problème des amendes de l'autre. Bientôt, il faudra être millionnaire pour rouler en voiture. Cela étant, je vous remercie de la réponse circonstanciée que vous avez donnée et de la voie tout à fait positive dans laquelle vous vous engagez tant au niveau de la mise au point des éléments techniques qu'au niveau de la poursuite de l'exécution de la loi relative au bureau de tarification.

-Het incident is gesloten.